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7 ans de réflexion

C’est en 2005 qu’est sorti le dernier épisode de la nouvelle trilogie des prequels de Star Wars, et au bout de 7 ans, je me suis dit qu’il était temps de faire un bilan personnel et général sur ce que représente aujourd’hui la « franchise » Star Wars.

Star Wars, ou plus précisément pour moi à l’époque, « La Guerre des Etoiles » a longtemps été une petite passion de ma jeunesse au point que je serais surement défini comme un geek aujourd’hui. Le premier film, « Episode 4 : A New Hope »  est sorti en 1977 et je me rappelle l’avoir vu au cinéma – sauf qu’il ne s’appelait pas comme ça à l’époque d’ailleurs  mais juste « Star Wars » en VO. Je ne sais pas exactement quand je l’ai vu, à l’époque les films les plus populaires pouvaient rester des années à l’affiche de certains cinémas comme le mythique « L’Escurial » Boulevard Port Royal ou on pouvait aller voir « Les Aventuriers de l’Arche Perdue » pendant a peu près toutes les années 80. Je me rappelle d’un petit cinéma, avec ma grand-mère, je devais avoir 4-5 ans. J’ai été fasciné par le film.

Je me rappelle les affiches pour « L’Empire Contre-Attaque » (quel titre débile en fait), sur les murs des cinémas de Montparnasse, en 1980, mais je n’étais pas allé le voir.

Je me rappelle de la folie de mes camarades de classe pour « Le Retour du Jedi » en 1983, quand j’étais au CM2. Je suis allé voir le film 3 fois au Bretagne. Ma passion est vraiment née à ce moment. Je ne manquais jamais les diffusions télés pendant les fêtes de Noel. J’avais acheté quelques jouets et même le jeu de rôle, et plus tard les jeux vidéo. A un moment je suis passé à la VO comme pour tout les autres films. Et comme tous les gens cultivés j’ai fini par m’apercevoir que « L’Empire Contre-Attaque » était de loin le meilleur film tandis que le « Retour du Jedi » était le pire, un remake du premier film avec certes plus de moyens mais, bon, des ours en peluche qui arrivent à vaincre l’armée impériale, c’est surement le summum du n’importe quoi !

Ces évidences étaient déjà claires quand j’ai revu vers 1997 tous les films au cinéma lors de la sortie de leurs « Editions Spéciales », le début d’un petit jeu de massacre de Georges Lucas envers son œuvre qui n’est toujours pas fini actuellement on dirait.

Mais comme tout le monde, j’attendais surtout la fameuse nouvelle trilogie qui promettait de nous raconter comment Anakin était devenu Darth Vader et comment la République avait été subjuguée par l’Empire. Cette histoire était théoriquement plus ou moins claire pour qui connaissait « l’univers étendu » de Star Wars. Cet univers étendu désigne le monde qui avait été créé au-delà des films par les livres, les BDs, les jeux etc… par des gens qui avaient reçu l’imprimatur de la société de Lucas, mais sans que ce dernier n’ai jamais reconnu le caractère officiel de toutes ces histoires. Pour situer le niveau intellectuel de cet univers étendu, un exemple suffira : dans le premier film, Obi Wan Kenobi explique à Luke que les Jedis servaient de protecteurs à la République : « For over a thousand generations the Jedi Knights were the guardians of peace and justice in the Old Republic. » Il est assez évident ici que Kenobi ne parle pas réellement de 1000 générations, que c’est une figure de style pour dire « pendant très longtemps ». Sauf que les auteurs de l’univers étendu ont pris ca littéralement. Une génération, c’est 25 ans, se sont-ils dits, donc la République a existé pendant 25,000 ans. Et ils se sont amusés à inventer 25,000 ans d’histoire intragalactique avec le même niveau d’intelligence et de créativité.

Aussi, je dois remercier Lucas pour au moins une chose, il a eu l’intelligence de ne pas tenir compte le moins du monde de cet univers – sans réellement le contredire d’ailleurs, après tout ça rapporte beaucoup.

En 1999, je suis donc allé voir « The Phantom Menace » le premier jour de sa sortie, au « kanyon Malha » de Jérusalem, avec des amis qui comme moi et toute la salle étaient très excités. 2 heures plus tard, on l’était beaucoup moins. Un ami, qui avait voyagé spécialement à New York pour y voir l’avant-première, et ceci alors qu’il n’avait pas un rond et qu’il a survécu avec quelques dollars pendant des semaines, m’ayant assuré que le film devenait excellent au 3eme visionnage, j’y suis retourné. Et effectivement, c’était nettement mieux, ou en tout cas c’est ce que j’ai pensé à l’époque. Je ne sais pas quand je l’ai revu une 3eme fois, mais à ce moment-là, la nullité du film était déjà claire à mes yeux, comme aux yeux de tout le monde aujourd’hui.

Je suis quand même allé voir le deuxième film, « Attack of the Clones », en 2002, et j’ai été nettement plus emballé. D’abord, jusqu’à aujourd’hui je pense que c’est le meilleur des trois, malgré les horribles scènes « romantiques » du film entre Natalie Portman et le catastrophique Hayden Christensen. Il y avait quelques promesses et des lignes scénaristiques intéressantes qui laissaient espérer quelques surprises pour le dernier film.

Malheureusement, ça devait être dans ma tête. Le dernier film, « Revenge of The Sith » est considéré par le grand public comme le moins pire de cette trilogie. Pas par moi. C’est au contraire celui qui m’a convaincu de l’absolue débilité de toute cette entreprise. Et ce dès la première scène, une scène de guerre spatiale qui semble sortie tout droit d’un jeu vidéo ridicule. A la même époque et avec des moyens 100 fois inférieurs, la série Battlestar Galactica nous offrait quelques scènes de bataille dans l’espace infiniment supérieures aussi bien sur le plan technique et esthétique, que sur le plan de l’implication personnelle qu’on pouvait ressentir comme spectateur.

Le reste du film était à l’avenant. Il ne se passe à peu près rien pendant la majeure partie et à la fin Anakin rejoint le « coté obscur de la Force » pour une raison absurde, tandis que Padme meurt… sans raisons.

Si à l’époque se déroulait un vaste conflit au sein des fans et même du grand public entre partisans et opposants à cette nouvelle trilogie, tout le monde aujourd’hui semble s’accorder autour du fait que ces trois films sont un immense ratage. Scenarii sans queue ni tête – si quelqu’un est capable de comprendre l’histoire du premier film, bravo -, personnages infantiles – Jar Jar en tête -, acteurs catastrophiques – Hayden Christensen encore une fois -, réalisation sans punch ni imagination (un comble), même les effets spéciaux étaient plutôt mauvais.

La nullité abyssale de Christensen n’était pas a priori un obstacle. Après tout, Mark Hamill – le type qui jouait Luke et que tout le monde a oublié ensuite – était tout autant médiocre et transparent. Ce n’est pas un hasard si Han Solo, qui à la base est un personnage secondaire et un anti-héros, est souvent vu comme le personnage principal. Et c’est lui qui « get the girl » à la fin. Mais il est vrai que personne ne pouvait vraiment faire quoi que ce soit face au charisme dévastateur d’Harrison Ford. Néanmoins, cette transparence d’Hamill, loin de gêner l’histoire, la sert. Bien que le personnage de Luke Skywalker soit fondé sur le héros archétypal issu de l’analyse des mythes de Joseph Campbell (au point que Star Wars en est presque une application pratique), il est avant tout l’instrument manipulé d’un schéma qui le dépasse. Luke est dès sa naissance l’outil de la vengeance de Kenobi et Yoda, et rien d’autre. Il n’a pas vraiment de choix, il fait ce qui a été prévu pour lui par d’autres. Il ne peut donc pas être un véritable héros moderne. Luke pose une intéressante problématique sur la nature du Messie : est-ce un homme hors du commun qui atteint cette position par ses qualités intrinsèques et les choix qu’il fait ou une personne prédestinée et sans choix ?

Le problème de Christensen est diffèrent : c’est avant tout un mauvais acteur pour un rôle qui nécessitait une grande finesse et une totale maitrise de la transformation d’un jeune garçon prometteur en monstre assassin à l’échelle galactique. Le résultat est effectivement à l’échelle galactique mais dans sa nullité.

Restent deux questions. La première est pourquoi donc cette étonnante volonté de la part de Georges Lucas de détruire l’œuvre qui l’a rendu célèbre. Entre les innombrables « retouches » aux anciens films qui ne font que les altérer en pire, les prequels qui ont cassé le mythe, et sans compter ce qu’il va encore faire, l’aura de Star Wars s’est largement dégonflée et ne semble plus enthousiasmer grand monde en dehors d’un noyau dur de fans. C’est une question à laquelle je ne peux pas répondre.

Je peux par contre essayer de contribuer à la seconde. Avec maintenant 6 films, la question qui se pose est de comment les regarder. Ils existent de nombreuses options : ignorer les prequels et faire comme s’ils n’avaient jamais existé ; voir les films comme ils sont sortis – les anciens d’abord, les nouveaux ensuite ; voir les films dans l’ordre chronologique de l’histoire, ce qui transforme l’histoire en mettant le focus sur Anakin – mais la grande révélation de la paternité de Luke à la fin de Empire Strikes Back est gâchée et c’est probablement un des plus importants moments de la série.

Il existe d’autres options plus intéressantes : certains voient les prequels comme une sorte de flashbacks au milieu de l’histoire et les insèrent après Empire Strikes Back et avant ROTJ. Ce qui fait un long flashback et casse le « flow » de la narration. Aussi d’autres sont arrivés à une solution plus radicale : supprimer complètement le premier film des prequels. En fait, il ne contribue strictement en rien à l’histoire générale et tout ce qui est nécessaire est rapidement rappelé au début du deuxième film.

Mais il y a une option encore plus radicale et intéressante, bien qu’elle ne soit pas possible pour la plupart d’entre nous : faire comme Topher Grace. Topher Grace est un acteur hollywoodien de « B list », essentiellement connu pour avoir été le héros de la série « The 70’s show ». Ces derniers temps il s’est intéressé au montage et a secrètement travaillé sur une nouvelle édition des 3 prequels. Le résultat a été projeté à un petit groupe de célébrités en mars dernier : un film de moins d’une heure et demi qui réunit les 3 prequels en un et donne enfin une histoire cohérente et intelligente. Certes il n’a rien pu faire pour sauver le jeu de Christensen ou les dialogue pathétiques et infantiles, mais il a offert le film que tout le monde avait attendu. Et ne verra jamais puisque pour des raisons évidentes de copyright, cette version ne sera jamais diffusée nulle part.

Néanmoins je crois que Topher Grace a compris quelque chose d’essentiel : la trilogie des prequels n’aurait jamais dû voir le jour. Pas uniquement à cause du résultat plus que médiocre, mais parce que l’idée même était absurde. Le monde de Star Wars est un monde mythologique constitué d’archétypes : l’Empire maléfique, le héros, la princesse, le chevalier noir, les gentils rebelles. Ce monde n’a pas et ne peut pas avoir une histoire précise, une logique politique interne, la moindre cohérence réaliste parce que ce n’est pas sa nature. Il n’a pas plus de sens que le monde de Blanche-Neige. C’est pour ça que l’univers étendu est une imbécilité. Et c’est pour ça que vouloir expliquer comment on en était arrivé là avec force détails politico-culturels ne pouvait conduire qu’au désastre.

En tout cas, 7 ans après, je peux au moins dire une chose : Star Wars ne m’intéresse plus.